Biotenségrité et ostéopathie : état des lieux et application à l’articulation sacro-iliaque
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Sarah VillarBiotenségrité et ostéopathie : |
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Mémoire en vue de l’obtention du Diplôme d'ostéopathe
Sous la direction de Jean-Christophe PIASENTIN DO & Céline DORLAND DO
Andrew Taylor Still Academy
Promotion juin 2025
Introduction
Introduction
1.1 Choix du design de l’étude
La biotenségrité en ostéopathie est un sujet que nous avons jugé pertinent d’explorer, bien que la littérature scientifique à ce sujet soit très limitée. En effet, la majorité des écrits disponibles concernant ostéopathie et biotenségrité sont composés de perceptions, de témoignages d’expériences personnelles et de méthodes non standardisées.
Pour cette étude, nous avons donc délibérément opté pour une approche hybride, combinant une revue narrative et une étude observationnelle qualitative. L’objectif principal est de proposer un état des lieux complet sur ce thème, afin de favoriser de futures recherches. Nous avons ainsi collecté et synthétisé des informations sur le sujet, en proposant à la fois un panorama détaillé et une analyse approfondie des pratiques telles qu’elles sont rapportées par les praticiens ayant une expérience de cette approche. L’articulation sacro-iliaque a été choisie comme exemple pour illustrer de manière plus concrète ce concept (2.2)
1.2 Contexte et justification
Le système fascial est aujourd’hui largement reconnu et documenté dans le domaine médical. Son rôle essentiel dans la mécanique du corps humain est depuis longtemps démontré, soulignant ainsi la nécessité de l’intégrer à notre conception anatomique. Ces notions sont désormais enseignées et rapidement assimilées au cours des études d’ostéopathie.
Le système fascial est défini comme un ensemble de tissus conjonctifs. La première définition en a été donnée dans l’ouvrage d’anatomie de Gray, publié en 1858, qui le décrivait comme « toute condensation de tissu conjonctif suffisamment épaisse pour être visible à l’œil nu ». Plus récemment, en 20091, une nouvelle définition a été proposée : « tissus collagéniques fibreux constituant une partie du vaste système de transmission tensionnel du corps ». Cette approche met en avant le continuum tensionnel fascial, s’éloignant ainsi de la conception traditionnelle qui considérait l’organisation des éléments constitutifs du corps humain comme une simple juxtaposition de structures anatomiques distinctes et indépendantes.
D’un point de vue fonctionnel, le système fascial regroupe les fascias souples et rigidifiés, incluant notamment les aponévroses superficielles, moyennes et profondes, les membranes dure-mériennes, les ligaments, les tendons, les muscles et les os.
Au sein de ce vaste sujet, la notion de biotenségrité est développée depuis une vingtaine d’années, lorsque les principes de tenségrité ont été adaptés au corps humain par Stephen M. Levin.
La tenségrité est un concept architectural pouvant être défini comme un système autocontraint et stable, formé d’éléments en compression discontinus à l’intérieur d’un réseau
d’éléments en tension continue. Adaptée à la biologie, la tenségrité devient biotenségrité, et permet un nouveau modèle représentatif du corps humain, qui peut s’appliquer de l’architecture cellulaire à l’anatomie du corps humain à plus grande échelle.
Une structure en tenségrité est donc un système réticulé spatial constitué de barres dont la rigidité et la stabilité sont dus à son état d’autocontrainte : la vision biotenségrale du corps explique que « les fascias souples (ligaments, muscles et tendons, aponévroses) participent à un ensemble autocontraint dans lequel sont suspendues de manières espacées, les densifications discontinues que sont les os. » [1].
Dans le corps humain donc, au niveau macroscopique, les muscles, tendons, et fascias forment des structures en tension continue, tandis que les os jouent le rôle d’éléments en compression. Cette organisation permet au corps de maintenir sa posture, d’absorber les chocs et de se mouvoir efficacement.
Dans la cellule, les travaux de Donald E. Ingber nous décrivent les principes de biotenségrité à l’échelle microscopique. Le cytosquelette, composé de microtubules (éléments en compression) et de microfilaments et de filaments intermédiaires (éléments en tension), maintient la forme cellulaire, tout en permettant les processus de division, de migration et de mécanotransduction.
Les travaux et vidéos du Docteur Jean-Claude Guimberteau sous endoscopie intratissulaire, confirment l’organisation de la trame fasciale et l’unicité tissulaire du corps humain, illustrant parfaitement le concept de biotenségrité, et venant témoigner de la fabuleuse organisation des tissus dans le corps humain, leur agencement, leur fonctionnement intrinsèque et leur capacité de régénération [2], [3].
Il est choisi d’utiliser l’exemple de l’articulation sacro-iliaque pour en permettre une application plus concrète. Il est couramment expliqué et communément admis que le sacrum est un coin venant s’encastrer dans les iliums [4] supposant une stabilité générée principalement par la gravité.
Or la biotenségrité, et plus précisément selon Graham Scarr, son « modèle en roue de vélo, montre comment les articulations synoviales peuvent fonctionner sans surcharger les tissus mous qui les entourent, même sous de très fortes charges, et comment les moyeux osseux « flottent » entre eux. (…) L’idée que le sacrum agit comme une clé de voûte au sein de la voûte pelvienne est complètement abolie (Levin, 2007 ; Pardehshenas et al., 2014) » [5].
De nombreux ostéopathes ont intégré ce concept anatomique dans leur pratique quotidienne. Ce travail de recherche a pour but de faire le point sur les écrits actuels concernant la biotenségrité et son application aux soins ostéopathiques, et d’illustrer ce propos à travers l’étude de l’articulation sacro-iliaque.
L’étude vise également à analyser l’influence des principes de la biotenségrité sur la pratique des ostéopathes formés à ce modèle. À cette fin, un questionnaire a été proposé à ces professionnels, et les réponses obtenues ont fait l’objet d’une analyse approfondie afin d’apporter un éclairage sur cette problématique.
1.3 Problématiques de recherche et hypothèses
1.3.1 Problématique principale
La biotenségrité nous offre un regard nouveau sur la biomécanique du corps humain, comment est-elle appréhendée par les différents ostéopathes qui l’ont intégrée à leur pratique ?
1.3.2 Problématique secondaire
La biotenségrité peut-elle nous offrir de nouvelles perspectives de prise en charge ostéopathique des dysfonctions de l’articulation sacro-iliaque ?
1.3.3 Hypothèses
Nous postulons que la biotenségrité constitue un concept théorique largement documenté et détaillé, dont l’application au corps humain s’étend de l’échelle macroscopique à l’échelle microscopique. De nombreuses études viennent étayer cette approche.
Nous formulons ensuite l’hypothèse que les professionnels qui s’engagent dans une étude approfondie de ce concept et qui en analysent la pertinence dans le cadre ostéopathique s’appuient sur un socle théorique commun. Toutefois, leurs approches d’exploration ensuite divergent, s’articulant principalement autour de justifications fondées sur des observations empiriques.
La biotenségrité propose une approche renouvelée et approfondie de l’architecture du bassin. Le modèle proposé suscite un intérêt manifeste, et offre de nouvelles perspectives dans l’approche ostéopathique de l’articulation sacro-iliaque. Bien que les pratiques des ostéopathes formés à la biotenségrité présentent certaines similitudes sur ce point, elles ne font pas l’objet d’un consensus établi.
Des études approfondies s’avèrent nécessaires pour évaluer la validité du modèle, en examiner les fondements scientifiques et en préciser les implications cliniques, tant sur le plan diagnostique que thérapeutique.
Table des matières
Table des matières
1 INTRODUCTION
1.1 CHOIX DU DESIGN DE L’ETUDE
1.2 CONTEXTE ET JUSTIFICATION
1.3 PROBLEMATIQUES DE RECHERCHE ET HYPOTHESES
1.3.1 PROBLEMATIQUE PRINCIPALE
1.3.2 PROBLEMATIQUE SECONDAIRE
1.3.3 HYPOTHESES
2 METHODOLOGIE
2.1 LA BIOTENSEGRITE A TRAVERS LA LITTERATURE OSTEOPATHIQUE
2.1.1 METHODOLOGIE DE LA REVUE NARRATIVE
2.1.2 ÉVALUATION DU RISQUE DE BIAIS
2.2 CHOIX DE L'ARTICULATION SACRO-ILIAQUE
2.3 LA BIOTENSEGRITE AU SEIN DE LA PRATIQUE OSTEOPATHIQUE
2.3.1 METHODE ET CRITERES DE VALIDITE
2.3.2 ÉVALUATION DU RISQUE DE BIAIS
2.3.3 ANALYSE DES DONNEES
3 SYNTHESE DES RESULTATS
3.1 DEFINITIONS, PRINCIPES ET MODELISATIONS
3.1.1 TENSEGRITE
3.1.2 BIOTENSEGRITE
3.1.2.1 Autocontrainte et gravité
3.1.2.2 Propriétés des tissus
3.1.2.3 L’icosaèdre de tenségrité
3.1.2.4 Une structure hétérarchique
3.1.2.5 A l’échelle cellulaire : la mécanotransduction
3.1.2.6 Dynamique du tissu conjonctif
3.1.2.7 Application aux articulations
3.1.2.8 Le modèle rachidien
3.1.2.9 Système cranio-sacré et membrane de tension réciproque (MTR)
3.2 MODELES BIOTENSEGRAUX DE L’ARTICULATION SACRO-ILIAQUE
3.2.1 LE MODELE CONVENTIONNEL
3.2.2 LE MODELE DE LA ROUE A RAYONS
3.2.3 INTEGRITE DE L’ANNEAU PELVIEN ET ROLE MUSCULAIRE
3.2.4 MODELISATION DU BASSIN : SECTION D’UN OCTET-TRUSS
3.2.5 LE FORAMEN OBTURE ET LA MEMBRANE OBTURATRICE
3.2.6 ORGANISATION DE L’EQUILIBRE TENSIONNEL INTRA-PELVIEN
3.2.7 LE FASCIA THORACO-LOMBAIRE DANS LE CONTINUUM FASCIAL
3.2.8 LE BASSIN ASYMETRIQUE
3.3 BIOTENSEGRITE ET OSTEOPATHIE : CONTRIBUTIONS THEORIQUES ET PRATIQUES
3.3.1 CONVERGENCE DES PRINCIPES OSTEOPATHIQUES ET DE LA TENSEGRITE
3.3.2 MODELISATIONS GEOMETRIQUES
3.3.2.1 Les arcs
3.3.2.2 Modélisation du rachis et Force de Traction Médullaire (FTM)
3.3.2.3 Les hélices
3.3.2.4 Le Mouvement Respiratoire Primaire (MRP)
3.3.3 BIOMECANIQUE DU MOUVEMENT
3.3.4 CHAINES CINEMATIQUES FERMEES (CCF)
3.3.5 LE CAS PARTICULIER DE L’OS
3.3.6 LA RENCONTRE DE DEUX SYSTEMES DE TENSEGRITE
3.3.7 LA DYSFONCTION SOMATIQUE
3.3.8 INTERET DE LA BIOTENSEGRITE DANS LA PRATIQUE OSTEOPATHIQUE
3.3.8.1 Les différents tests ostéopathiques
3.3.8.2 Les différentes techniques ostéopathiques
3.4 BIOTENSEGRITE AU SEIN DE LA PRATIQUE : A L’ECOUTE DES PROFESSIONNELS
3.4.1 PREAMBULE
3.4.2 ANALYSE DES PARTICIPANTS
3.4.3 ANALYSE DES PUBLICS CONCERNES
3.4.4 ÉVALUATION DE L’EFFICACITE DE L’APPROCHE BIOTENSEGRALE
3.4.5 BIOTENSEGRITE ET PERCEPTION TISSULAIRE
3.4.6 LES MODELES THEORIQUES DE L’ARTICULATION SACRO-ILIAQUE
3.4.7 TESTS ET TECHNIQUES OSTEOPATHIQUES DE L’ARTICULATION SACRO-ILIAQUE EN BIOTENSEGRITE
3.4.8 CONCLUSION
4 DISCUSSION
5 CONCLUSION
6 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
7 ANNEXES
8 TABLE DES ILLUSTRATIONS
8.1 TABLE DES ILLUSTRATIONS
8.2 SOURCE DES ILLUSTRATIONS